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de la campagne de 1805. Chacun sait que pendant cette périod les jambes de nos soldats furent mises à contribution bien plus qu leurs fusils. Des manoeuvres audacieuses, des combats parties suffirent pour obliger le général autrichien Mack à capituler das Ulm, et pour consommer l'annihilation de son armée.

La marche sur Vienne et la suite des opérations qui conduisirent Napoléon jusqu'à Brünn, présentent le même caractère. Quelques affaires d'arrière-garde où les Austro-Russes essaient en vain de retarder la rapidité foudroyante de l'envahisseur, mettent seules aux prises les deux armées, et la capitale de l'Autriche qui es encore, à cette époque, celle de l'empire germanique, tombe san coup férir aux mains du vainqueur.

Mais à Brünn l'empereur s'arrête.

de

On est au 20 novembre. Au mois d'août les corps de la Grande Armée étaient encore échelonnés le long des côtes de la Manche et de la mer du Nord, menaçant l'Angleterre. Deux mois et demi ont suffi pour les amener d'un élan irrésistible à l'autre bout de l'Europe, au centre des états autrichiens. Maintenant le moment est venu de reprendre haleine. Il est temps de se recueillir. Il est temps se préparer à un dénouement qui ne peut tarder, car la principale armée ennemie est rassemblée aux environs d'Olmütz, à une soixantaine de kilomètres à peine de Brünn; elle a reçu des renforts; l'empereur de Russie lui-même les accompagne ; il a rejoint au milieu des troupes l'empereur d'Autriche. Des évènements nouveaux et décisifs sont imminents.

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Vers cette fin de novembre la situation respective des deux adversaires peut se résumer de la manière suivante.

Les forces opposées ont à peu de chose près le même effectif. Les Français comptent un peu moins, les Austro-Russes un peu plus de 170,000 combattants.

Les troupes françaises sont dispersées sur une étendue immense allant d'Eylau, près de la frontière de Bohême, jusqu'à la Carniole où débouche Masséna à la tête de la petite armée d'Italie. Napoléon lui-même n'a guère plus de 50,000 hommes avec lui.

Les alliés, au contraire, abstraction faite d'un détachement en Bohême, ne forment que deux grosses masses; au Nord Est, l'armée austro-russe rassemblée près d'Olmütz sous les yeux des dear empereurs (85 à 90,000 hommes); au Sud l'armée autrichienne des archiducs Charles et Jean (90,000 hommes) qui se retire vers Hongrie suivie par Masséna. Mais une distance de 360 kilomètres,

à vol d'oiseau, sépare les deux tronçons, et cet intervalle est rempli par des bataillons français habitués à vaincre, que Napoléon saura concentrer d'une main sûre là où il faudra, au moment opportun.

Que feront les alliés ? Continueront-ils à battre en retraite pour tenter de réunir l'armée des empereurs à celle des archiducs et marcher ensuite sur Vienne avec toutes leurs forces réunies? Resteront-ils sur place pour attendre les évènements? Ou adoptant une résolution plus hardie profiteront-ils de la dispersion des Français (dispersion plus apparente que réelle) pour prendre l'offensive avec l'armée austro-russe, pour se jeter sur Napoléon qui est là, tout près, à trois journées de marche, et pour l'écraser avec des forces presque doubles ?

Jusque-là l'ennemi, précipitant ses coups, leur avait dicté sa loi. Dans ce duel gigantesque ils n'avaient pas eu le temps de songer à autre chose qu'à parer et à rompre. Maintenant que l'ardeur de l'adversaire paraissait se refroidir, le moment n'était-il pas venu de renverser les rôles?

Quel que fût l'avis qui devait prévaloir, le succès était bien incertain. Les nouveaux procédés de guerre que Napoléon révélait au monde et qui étaient fondés avant tout sur une extrême mobilité, donnaient aux Français une supériorité trop grande sur les lourdes armées alliées.

Dans de pareilles conditions la plus grande circonspection était de rigueur. Rien ne pouvait être plus fâcheux pour le commandement austro-russe, que d'interpréter comme un signe de découragement le temps d'arrêt marqué par Napoléon, et de s'imaginer qu'intimidé par sa situation aventurée ce grand capitaine s'en laisserait imposer. C'est pourtant cette opinion qui ne tarda pas à faire loi un grand quartier général des alliés, et à y dominer toutes les résolutions.

Jamais erreur ne fut plus chèrement payée.

L'emper

L'empereur Alexandre était entouré à Olmütz d'un essaim d'aides de camp, d'officiers de salon qui n'ayant jamais fait la guerre jugeaient toutes choses avec cette présomption et cette jactance qui sont, trop souvent, le défaut des gens de cour.

Dans ce milieu pétri d'orgueil et de vanité, on professait le plus profond mépris pour ' Buonaparte,' le parvenu, l'usurpateur, et pour sa bande d'anciens révolutionnaires.

Tolstoi dépeint admirablement cet état d'esprit dans son roman 'la Guerre et la Paix' quand il fait dire au prince russe Dolgoroukov

(historiquement Dolgorouki), au retour d'une mission auprès de Napoléon: Lui ? C'est un homme en redingote grise qui désira beaucoup que je l'appelasse Votre Majesté et qui a été fort déi de ne recevoir de moi aucun titre. Voilà l'homme que c'est, rie de plus.'

Pour des gens aux idées aussi étroites, aux impressions aussi puériles, l'immobilité de Napoléon à Brünn était significative; son inquiétude devenait évidente. Dès lors la conduite à tenir était toute tracée: il fallait aller de l'avant. Les Autrichiens avaient pu se laisser battre par cet aventurier. Rien ne résisterait aux phalanges russes électrisées par la présence de leur empereur.

On sait avec quelle rapidité se forme un courant d'opinion. Bientôt l'offensive fut décidée.

Les Russes ne faisaient guère fond sur la valeur de leurs allies comme troupe de combat. Mais peu propres eux-mêmes aux besognes d'état-major et au travail de bureau, ils professaient presque tous une sorte de respect instinctif pour la science des officiers autrichiens. Or l'un de ceux-ci, le général Weirother, avait élaboré un plan superbe qui aboutissait immanquablement —sur le papier—à couper Napoléon de Vienne et à le rejeter en Bohême.

Il n'en fallait pas davantage pour tourner la tête aux écervelés qui avaient capté la confiance d'Alexandre et qui donnaient le ton au grand quartier général. La précision allemande unie au courage russe ! ' Que fallait-il de plus pour assurer le succès ?

Napoléon accueillit avec joie les premiers indices de l'offensive russe. Il allait donc pouvoir livrer la bataille qui lui était nécessaire. Il allait imposer la paix par un coup d'éclat s'il n'était pas possible de l'obtenir autrement. En tous cas il sentait le besoin d'aboutir le plus tôt possible, car la Prusse avait mobilisé son armée, et d'ici peu on pouvait l'avoir sur les bras.

Extrêmement habile à utiliser tous les moyens imaginables pour pénétrer le caractère et les intentions de ses adversaires, Napoléon ne se borna pas à employer les sources d'information habituelles. Sous le prétexte plus ou moins sincère d'entrer en pourparlers avec l'empereur Alexandre, il envoya au quartier général allié son aide de camp Savary qui ayant traversé les lignes ennemies et causé avec les uns et les autres, lui rapporta des indications précieuses non-seulement sur l'état d'esprit qui règnait dans l'entourage impérial, mais encore sur les mouvements des troupes alliées.

Il put d'ailleurs se convaincre par lui-même de l'incroyable arrogance de l'état-major russe en recevant-aux avant-postes seulement l'aide de camp Dolgorouki dont il supporta patiemment les impertinences, mais dont il se vengea plus tard dans le 3°. Bulletin de la Grande Armée en le traitant de jeune trompette de l'Angleterre,' et ses pareils de 'freluquets.' Napoléon prit donc ses dispositions en pleine connaissance de cause, et sachant parfaitement à qui il allait avoir affaire. Il ne fut pas toujours aussi clairvoyant. Les erreurs d'appréciation qu'il commit lors de la campagne de 1815, par exemple, en méconnaissant ce dont étaient capables Wellington et Blücher, montrent bien que personne n'est infaillible, pas même un grand captaine.

Perpendiculairement à la direction de marche que devait suivre forcément l'armée alliée en prenant l'offensive, s'étendent les hauteurs de Pratzen, sur le revers oriental desquelles on remarque le bourg d'Austerlitz. L'armée française aurait trouvé là d'excellentes positions défensives et un général ordinaire n'eût pas laissé échapper cette occasion de compenser son infériorité numérique par l'avantage du terrain.

Mais Napoléon avait d'autres vues.

Après avoir occupé d'abord les hauteurs de Pratzen il ramena ses troupes plus en arrière, le long d'un ruisseau qui coule au pied de ces collines. En agissant ainsi il gagnait d'abord un jour. S'il se fût établi à Pratzen, les alliés se heurtaient à lui dès le 1 décembre. Sa retraite sur la ligne du Goldbach retardait le choc jusqu'au 2 et donnait le temps à d'importants renforts de venir le réjoindre.

Mais ce mouvement de recul avait encore un autre avantage. Il entretenait les alliés dans l'erreur où les avait plongés leur présomption. Il leur faisait croire qu'ils avaient devant eux un adversaire intimidé qui ne songeait qu'à se retirer et avec lequel il était dès lors inutile de s'embarrasser de beaucoup de précautions. Un pareil état d'esprit devait fatalement les amener à commettre quelque faute dont leur terrible adversaire saurait profiter.

Or cette faute Napoléon l'avait prévue, en étudiant le terrain. Il avait deviné que ne le rencontrant pas sur les hauteurs de Pratzen, les alliés descendraient en masse de ces collines pour tourner sa droite et le couper de Vienne: mouvement fort dangereux du moment qu'il s'exécutait non pas devant un ennemi en retraite, mais bien en présence d'un général actif, audacieux, tout pret,

suivant l'expression de l'empereur, à prendre l'adversaire 'e flagrant délit de manœuvre.'

Napoléon, peu scrupuleux sur le choix des moyens propres à augmenter son prestige, n'a cherché que trop souvent à dénaturer la vérité pour faire croire à l'infaillibilité de son coup d'œil et de son esprit prophétique. Mais ici il n'y eut point de supercherie. La sagacité de l'empereur lui permet d'annoncer réellement à l'avance le mouvement qui devait amener la perte de ses adversaires. On en a la preuve matérielle dans la proclamation qu'il adressa à ses troupes le 1 décembre et où il dit textuellement :

'Les positions que nous occupons sont formidables, et pendant qu'ils (les ennemis) marcheront pour tourner ma droite, ils me présenteront le flanc.'

La répartition des troupes françaises sur le champ de bataille était merveilleusement appropriée à la situation, et aux intentions du général en chef. A la gauche Lannes, avec deux divisions, barrait la route d'Olmütz; un piton fortifié, puissamment garni d'artillerie, lui servait de point d'appui. A la droite de Lannes, Murat avec sa cavalerie avait devant lui une plaine ondulée éminemment propre à l'action des troupes à cheval. Puis venait Soult dont deux divisions étaient destinées à gravir les hauteurs de Pratzen dès que l'ennemi les abandonnerait, tandis que la troisième division, appuyée par un peu de cavalerie, formait l'extrême droite, dans une région entrecoupée d'étangs. En arrière du centre Napoléon avait gardé sous sa main tant en deuxième ligne qu'en resérve: le corps de Bernadotte (deux divisions), les grenadiers Oudinot, et la garde, c'est à dire environ 25,000 hommes, le tiers de l'armée.

La droite, point d'attaque prévu, était donc faiblement garnie, ce qui devait encourager l'ennemi à accentuer sa manœuvre. Toutefois on n'avait pas à craindre de ce côté un écrasement complet, car Davout, qui accourait à marches forcées, était arrivé le 1 décembre au soir à proximité de cette aile. Il amenait avec lui une division d'infanterie et une division de cavalerie et l'on pouvait compter sur l'intervention de ces renforts dès les premières heures du jour.

Les alliés, forts de 85,000 hommes, étaient divisés en 5 colonnes, avec avant-gardes et réserve. Le 1 décembre leur gauche et leur centre occupaient les hauteurs de Pratzen; leur extrême droite, un peu en retraite, tenait la route d'Olmütz à Brünn.

Le 2 décembre, bien avant le jour, les trois colonnes de gauche,

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