Enfin et surtout le projet de Déclaration internationale, arrêté par la Conférence de Bruxelles en 1874, énonce les règles essentielles du droit de la guerre, telles qu'elles sont reconnues de nos jours dans tous les États civilisés. Cet acte, dû à l'initiative de S.M. l'Empereur Alexandre II., constate l'accord existant sur ce point entre les hommes compétents qui représentaient tant la Russie et la Turquie, que tous les autres États de l'Europe. Il est vrai que jusqu'ici il n'a pas reçu de sanction officielle. Mais il n'en doit pas moins être considéré, eu égard à sa nature et à son origine, comme l'expression raisonnable des obligations que la conscience juridique des peuples européens impose aujourd'hui aux armées belligérantes comme aux populations des pays envahis. A ce titre, il serait éminemment propre à servir de base à des instructions qui seraient données par les belligérants à leurs armées respectives. Dans tous les cas, un État ou une armée, qui méconnaîtrait ces règles, encourrait la réprobation de l'opinion publique, et renoncerait à son honneur de puissance ou d'armée civilisée. Cet acte consacre en substance les règles suivantes, dont la force obligatoire paraît aujourd'hui incontestable : A) Les habitants paisibles d'un pays occupé par l'ennemi doivent être respectés et protégés autant que possible,-c'est à-dire, autant que le permettent la sécurité de l'armée envahissante et les nécessités militaires,-dans leurs biens, dans leurs institutions et leurs usages, dans leurs droits et leurs libertés. B) L'honneur et les droits de la famille, la vie et la propriété des individus, ainsi que leurs convictions religieuses et l'exercice de leur culte doivent toujours être respectés. c) La destruction ou la saisie inutile d'oeuvres d'art et de science, d'établissements consacrés aux cultes, à la charité et à l'instruction, aux arts et aux sciences, est interdite. D) Les habitants peuvent défendre leur pays, à condition de porter les armes ouvertement, d'obéir à un chef responsable et de se conformer aux lois et coutumes de la guerre. Mais les combattants irréguliers qui, méconnaissant les lois de la guerre, se livrent à des actes de brigandage et de violence sont justement punis. E) L'emploi de poison ou d'armes empoisonnées, le meurtre par trahison, ou le meurtre d'un ennemi sans défense ne sont pas des moyens de guerre licites. F) Ne peuvent être bombardées que les localités défendues par l'ennemi. Dans ce cas même on usera de tous les ménagements compatibles avec les nécessités de l'attaque, et, en aucun cas, une ville prise d'assaut ne sera livrée au pillage. G) Ne peuvent être considérés comme espions et punis comme tels, que les individus qui ont agi clandestinement ou sous de faux prétextes, et non les militaires non déguisés ou les messagers qui accomplissent ouvertement leur mission. H) Les prisonniers de guerre doivent être traités avec humanité. Le but de leur captivité ne doit pas être de les punir, mais de les garder. 1) Les habitants du pays envahi ne peuvent être contraints. à porter les armes contre leur patrie. K) Tout pillage est interdit. L) Les contributions de guerre et les réquisitions ne peuvent être imposées que sous des conditions et dans des limites déterminées. M) Les parlementaires sont inviolables. Mais il est licite de prendre des mesures pour les empêcher de se procurer, grâce à leur situation privilégiée, des informations sur l'armée ennemie. N) Les capitulations et les armistices doivent être rigoureusement observés. Les capitulations ne doivent pas être contraires à l'honneur militaire. Nous savons combien il est difficile d'avoir toujours devant les yeux, au milieu des périls de la guerre, les prescriptions rigoureuses de l'humanité. Le soldat excité par l'ardeur du combat, par l'enivrement de la victoire, par une résistance aux abois, ou par le sentiment de sa propre conservation, n'est que trop naturellement porté à violer, sans réflexion comme sans scrupule, les règles de modération qu'il approuvait pleinement quand il était de sang-froid. Mais le but suprême du droit, qui est d'assurer et de maintenir entre les hommes des relations humaines, n'en doit pas moins dominer la guerre ellemême. Cette vérité ne saurait être rappelée avec trop d'insistance à ceux qui gouvernent les peuples ou commandent les armées. C'est dans cette pensée que nous invitons les journaux des États belligérants comme ceux des pays neutres à accorder leur publicité au présent appel. Ils nous aideront ainsi à dissiper les derniers restes de ce préjugé barbare et funeste que "dans la guerre tout est permis!" Ils contribueront à répandre la connaissance et la pratique des véritables principes du droit des gens. Pour l'Institut de droit international: Le président, D' BLUNTSCHLI (Heidelberg). Le 1 vice-président, E. DE PARIEU (Paris). Le 2me vice-président, T. M. C. ASSER (Amsterdam). Le secrétaire-général, G. ROLIN-JAEQUEMYNS (Gand). No. V. 11. ANCIENT INDIAN IDEAS ABOUT WAR. 9. CONQUERORS SHOULD KINDLY TREAT THE VANQUISHED. Mahābhārata, xii. 3487 ff. He who a foe has seized in fight A foe whose deeds were fair and right- When thou hast caused another woe, Thou shouldst him more thy kindness show. By friendly acts his heart to win, Ye shall not long remain estranged: The foes shall soon to friends be changed. xii. 3487 ff. "He transgresses the duty of a Kshatriya who, having captured a hostile king who has acted fairly, through hatred fails to treat him with respect. A powerful king should be bland, should show compassion (to those) in calamity. Such a prince is dear to all creatures, and does not fall from the condition of prosperity. A man should act all the more kindly to him who has suffered at his hands. He who, being disliked, shall do what is kind, will soon become dear."-Further Metrical Translations, with Prose Versions, from the Mahabharata. By John Muir, D.C.L. P. 16. 10. KSHATRIYAS (RAJPUTS) SHOULD FIGHT FAIRLY, AND SPARE THE VANQUISHED, &c. Mahābhārata, xii. 3541 ff., 3557 ff., 3659 b., 3675 ff. A Kshatriya fairly ought to fight, His foes on equal terms should meet; Destroys himself-he basely sins. A beaten foe who takes to flight, Or to his home for succour send. Before a year its course has sped. xii. 3541. "A Kshatriya who is not clad in armour is not to be encountered in battle. A single warrior is to be fought by a single warrior, so that a man who is unable (to fight) may be let go. [According to the reading in the Bombay edition, this must be translated: 'One warrior must be addressed by another, "Do thou discharge thy weapon, and I shoot."'] 3542. If (the foe) comes accoutred, his adversary must also equip himself: |