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la Revue Thomiste établit clairement que les sueurs de sang ne se présentent pas avec le caractère merveilleux et surnaturel qu'elles

ont pour les personnes mal renseignées. Nous ne prétendous point

une

:

d'ailleurs qu'une sueur de sang ne peut pas avoir dans certains cas cause surnaturelle tout phénomène naturel peut avoir exceptionnellement une cause surnaturelle; mais nous disons (et nous nous croyons autorisés à le dire après cette étude) que les sueurs de sang se rattachent nettement aux hémorrhagies névropathiques, phénomènes de cause naturelle, et comme ces dernières ont une cause naturelle. Une sueur de sang ne saurait dans aucun cas être considérée a priori comme ayant une cause surnaturelle; pour établir dans certains cas son origine surnaturelle il serait absolument indispensable d'en faire une démonstration fondée, non sur l'existence du phénomène lui-même, mais sur les conditions dans lesquelles il se serait produit.

MAURICE ARTHUS

et

Dr VICTOR CHANSON

(à Fribourg).

(à Paris).

LA CONSERVATION DE L'ÉNERGIE

ET LA LIBERTÉ MORALE

Dans ces derniers temps le déterminisme mécanique semble avoir perdu son prestige. On a fini par s'apercevoir que la conservation de l'énergie, principe fondamental de toutes les sciences physiques et naturelles, n'a rien d'irréductiblement contradictoire avec la liberté humaine. Toute la fortune de la difficulté reposait sur un audacieux paralogisme, et sur le respect un peu superstitieux qu'inspire aux profanes le langage mathématique. Les termes rébarbatifs ont été éliminés, le sophisme réduit à néant; les défenseurs de la liberté ont repris pleine confiance, et se demandent parfois comment une objection si fragile ait pu se maintenir si longtemps.

Chose étrange, de nombreux auteurs ont nié catégoriquement qu'une force quelconque pût agir sur un système mobile, autrement qu'en augmentant ou diminuant sa force vive. M. Fouillée, par exemple, qui a traité la question d'une manière assez étendue (1), n'oppose à la solution de Cournot que cette négation déconcertante. Il n'est cependant plus permis, même à un philosophe, d'ignorer l'existence des forces purement directrices, agissant normalement à la trajectoire du mobile, et ne produisant ainsi aucun travail, puisque la projection de la force sur la trajectoire est nulle. Dans un article remarquable, le R. P. Hahn, S. J. vient de le rappeler à M. Errera, qui semble l'avoir oublié (2), et

(1) A. FOUILLÉE. La liberté et le déterminisme.

(2) R. P. HAHN, dans la Revue des questions scientifiques; janvier 1898. M. Errera et les anciens vitalistes. M. Errera avait fait quelques conférences sous ce titre : Existe-t-il une force vitale? avec l'intention avouée d'embarrasser la philosophie traditionnelle et l'Église. J'imagine qu'après la lecture du travail du R. P. Hahn il se doutera bien un peu que ces malheureuses conférences ne sont embarrassantes que pour lui-même.

j'ai déjà insisté sur cette donnée absolument élémentaire en mécanique dans un article de la Revue Thomiste (1). Cette seule considération suffirait pour écarter à priori l'objection dans la forme générale qu'on lui a parfois donnée. Il est possible d'agir sur un mouvement, de le modifier d'une manière très sensible, sans modifier la somme des énergies. Dès lors, on ne peut plus conclure à l'impossibilité des actions vitales et de l'acte libre par ce seul fait qu'ils ne font pas varier l'énergie.

Mais il y a mieux. Soumetiant l'objection déterministe à une analyse approfondie, le R. P. Couailhac, S. J., y a signalé un autre défaut, qui suffit amplement à la déclasser (2). Le théorème des forces vives, aussi bien qu'il soit réalisé dans l'univers, n'envisage cependant qu'un côté partiel de la réalité. Sa portée et son application possible se limitent à la quantité. Ce que les modernes. appellent la « qualité » est complètement étranger aux formules comme aux mensurations expérimentales des physiciens. Le mouvement cinétique lui-même, la plus quantitative peut-être des réalités, enveloppe encore un côté qualitatif, notamment sa direction, qui n'a rien à voir à la conservation de l'énergie cosmique. De quel droit, par conséquent, déclarerait-on l'acte libre inefficace et impossible, si tout le domaine de la qualité est soumis à son influence, et peut subir son action sans entraîner la moindre variation soit dans la force vive, soit dans l'énergie potentielle ?

Je crois que l'étude du R. P. Couailhac constitue l'examen le plus complet, le plus approfondi de l'argument déterministe, depuis que la question a été soulevée. Il est aisé, surtout depuis la publication de ce profond travail, de réfuter ad hominem l'objection fondamentale du déterminisme mécanique. Si tel est le but du R. P. Couailhac, je ne crains pas d'affirmer qu'il l'a pleinement atteint. A toute évidence, il a montré qu'une influence réelle sur les événements n'implique pas fatalement une variation dans l'énergie.

Mais ce n'est là que le côté négatif de la question, et elle présente un aspect positif des plus intéressants. Autre chose est de

(1) Cf. Rev. Thom., mai 1897.

(2) M. COUAILHAC, S. J. La liberté et la conservation de l'énergie.

convaincre les déterministes d'une faute dialectique, autre chose de résoudre la question qui a donné naissance au sophisme. Si l'on accepte la conservation de l'énergie dans toute sa rigueur, si l'univers matériel est vraiment un système clos, il en résulte que la volonté libre, que l'intelligence spirituelle opèrent sans produire du travail. Ne serait-il pas d'un certain intérêt de déterminer comment s'exerce une telle action.

Ce second problème, très différent du premier, me paraissait étranger à l'ouvrage du R. P. Couailhac, lorsque le R. P. Portalié, dans un intéressant article (1), présentait le livre comme sa solution. Il l'oppose à la réponse que j'ai eu l'honneur d'esquisser ici même, il y aura bientôt deux ans, dans laquelle le R. P. Portalié ne voit qu'un aperçu partiel, indùment limité à l'activité libre, et dont le R. P. Couailhac aurait donné la formule générale (2).

A ce point de vue l'examen de la thèse s'impose et je dirai dès l'abord qu'elle ne paraît pas acceptable.

Le théorème des forces vives, corroboré par l'observation, établit la constance de l'énergie. La quantité d'énergie est constante, réplique le R. P. Couailhac; mais sa qualité est-elle invariable? Il n'en faut pas davantage pour détruire le déterminisme mécanique; mais cela ne suffit certes pas pour montrer comment la volonté peut opérer sans produire du travail. Pour plus de clarté, voici un syllogisme dont les prémisses devraient être justifiées pour résoudre cette dernière question:

Les modifications qualitatives n'entraînent pas dans l'énergie cosmique une variation de quantité.

Or la volonté libre ne modifie que la qualité de l'énergie.

Donc la volonté n'augmente ni ne diminue la somme des énergies.

Le livre du R. P. Couailhac établit surabondamment la majeure

(1) E. PORTALIÉ. La liberté et la conservation de l'énergie (Etudes, 20 sept. 1898). Je saisis avec empressement cette occasion pour remercier le R. P. Portalié de l'extrême bienveillance avec laquelle il a jugé mon petit travail.

(2) Il est entendu que je ne prétends nullement réfuter la thèse du R. P. Couailhac. Je le répète, elle est inattaquable; elle nous fournit un moyen original et solide de réfuter l'argument déterministe; et je ne saurais assez rendre hommage au mérite de l'auteur. Il s'agit uniquement de l'usage que l'on veut faire de son idée.

de ce syllogisme; mais on y chercherait en vain la moindre preuve de la mineure. Cette dernière pourrait être avancée comme une hypothèse, c'est incontestable; mais on pourrait, au même titre, formuler l'action perpendiculaire de Cournot ou l'action de présence de Naville; et aussi longtemps qu'on ne pourra la justifier que par l'impérieux besoin d'avoir explication quelconque, on n'aura aucun droit de se plaindre quand elle sera rejetée comme une supposition gratuite.

Dans cette mineure, cependant, gît toute la question. Il s'agit de trouver un mode opératoire, applicable, non pas à priori, mais en vertu d'arguments positifs, à la volonté libre, et qui n'entraîne aucune variation dans la somme des forces vives et de l'énergie potentielle. Le R. P. Portalié, s'appuyant sur les études de son savant confrère, affirme avoir trouvé la solution: la volonté agirait sur la qualité de l'énergie. Eh bien, il reste encore à le démontrer, car le R. P. Couailhac ne l'a point fait, et, j'imagine, n'a pas eu l'intention de le faire.

Il y a plus. Interprétée comme le R. P. Portalié a cru pouvoir le faire, la thèse ne se réduit pas seulement à une affirmation gratuite; cette affirmation ne s'applique même pas à la question.

L'idée du R. P. Couailhac a une portée très générale. En réalité, elle constitue une des grandes lois cosmologiques; et il était d'autant plus opportun de la souligner, que toutes les tendances des sciences expérimentales, dans leur conception actuellement prépondérante, contribuent à la laisser dans l'ombre. Mais cette généralité même doit nous prémunir contre une application précipitée à un cas exceptionnel. Car, ne l'oublions pas, la liberté humaine est vraiment une exception lorsqu'on envisage l'ordre du monde dans son ensemble. Seul parmi tous les êtres, plongeant dans la matière par une partie de leur réalité, l'homme possède l'initiative de ses opérations, le choix des moyens vers une fin déterminée. Tout être matériel modifie qualitativement l'énergie qu'il renferme. Cette énergie, constante dans sa quantité, porte cependant l'empreinte qualitative du corps où, prisonnier un instant ou un siècle, il prend de nouveau son essor parmi les phénomènes tangibles de l'univers (1). Oui, chaque essence matérielle oriente d'une façon.

(1) Je crois inutile de répéter ici que je ne prétends nullement défendre une théorie cinétique quelconque, ni admettre surtout l'individualité inaltérable du mouvement dans ses multiples passages d'un sujet à un autre.

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