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insuffisamment comprises, vues à travers des lunettes trop modernes ! Et je parle des données élémentaires non pas de ce domaine où règnent les systèmes. Cela était inévitable, M. Fonsegrive n'étant pas spécialiste. Mais ces professeurs qu'il va lancer dans les Commentaires sur Aristote et sur Pierre Lombard le seront-ils davantage?

Il y a certainement quelque chose à faire; mais quoi? Ce n'est pas assez du contact des idées, il faudrait le contact des hommes; or ni les philosophes ni les scolastiques vraiment compétents ne courent les rues. La synthèse ne saurait cependant jaillir que de leur rencontre et ce sera toujours un leurre que la conciliation unilatérale telle que M. Fonsegrive semble la recommander: car ce serait un grand hasard et un véritable tour de force qu'entreprise avec si peu de chances de succès elle pût contenter les deux parties.

(Quinzaine, 1er février 1898.)
A. G.

NOTES BIBLIOGRAPHIQUES

C. FOUARD Saint Paul, ses dernières années (Paris, Lecoffre, 1897, in-8°, vi-426 p.).

M. le chanoine Fouard nous donne avec ce volume la fin de l'apostolat de saint Paul, voire même des origines de l'Eglise en tant qu'on entendrait par ce mot cette partie de l'histoire de l'établissement du christianisme qui tombe dans le temps marqué par la presque totalité des écrits canoniques du Nouveau Testament.

Le public catholique connaît depuis longtemps l'œuvre de M. Fouard inaugurée par la Vie de N.-S. Jésus-Christ et continuée par les volumes sur Saint Pierre et les premières années du christianisme, Saint Paul, ses missions et enfin le volume dont nous signalons l'apparition. Sous ces titres M. Fouard a en réalité écrit l'histoire du christianisme jusqu'à l'an soixantedix. Autour des noms des deux grands apôtres Pierre et Paul et de leur action, les événements relatifs à l'histoire de la première génération chrétienne sont groupés de façon à former un tout historique complet, comme l'indique d'ailleurs le titre général donné par l'auteur à ses travaux : Les Origines de l'Eglise.

Le volume sur saint Paul et ses dernières années embrasse les événements qui vont de la première captivité de Paul à la ruine de Jérusalem, L'auteur étudie les emprisonnements de saint Paul et ses dernières missions, son activité littéraire et celle de Luc qui en dépend, la persécution

sous Néron et le martyre des deux grands apôtres en Orient, la mort de Jacques de Jérusalem et la guerre de Judée.

M. Fouard a déployé dans l'exécution de ce programme les qualités maîtresses dont il avait fait preuve antécédemment. Son érudition est sûre et abondante. Elle vise, non à des discussions critiques, mais à l'exposé précis et méthodique des résultats. Les spécialistes peuvent d'ailleurs aisément se rendre compte, en présence de la solution donnée à certaines questions, que l'auteur connaît les difficultés de son sujet, qu'il les a méditées par devers lui de façon à satisfaire aux exigences de la tradition ecclésiastique et à celle de la tradition exégétique et historique. Le récit est sobre, lumineux et plein d'intérêt. Le style revêt une originalité de bon goût avec quelque chose de calme et de tempéré, approprié à la gravité et à l'importance du sujet.

Les deux derniers écrits du Nouveau Testament, l'Apocalypse et l'Evangile de saint Jean, n'ont pas encore trouvé place, à raison de leur date postérieure, dans l'œuvre de M. Fouard. Nous aimons à nous persuader que leur étude nous arrivera avec un nouveau volume sur l'apôtre saint Jean.

P. M.

CH. DE RIBBE: La Société Provençale à la fin du moyen âge (Paris, Perrin, 1898, 1 vol. in-8°, XII-572).

Avec cette intéressante et savante monographie sur la société provençale à la fin du moyen âge, M. Ch. de Ribbe a ramené plus en arrière les investigations qu'il avait déjà portées sur différents points de l'histoire des mœurs pendant les derniers siècles. Comme les autres cette étude est une contribution importante à l'histoire de la civilisation de l'ancienne France. L'auteur nous indique lui-même dans quelques lignes de sa préface le moment choisi par lui pour nous présenter la vie provençale et les éléments de la vie publique et privée sur lesquels porteront ses recherches. Il prend, nous dit-il, la Provence « au moment où, tout en étant près d'être réunie à la France, elle formait encore une nationalité jalouse de se conserver pleine et entière dans ses coutumes, et aussi, au lendemain de cette réunion, lorsqu'elle continuait à garder les conditions essentielles de son autonomie. Moment unique pour la considérer de près, que celui de sa première renaissance sous son bon roi, le roi René, puis de sa complète résurrection sous Louis XII; pour essayer de le faire revivre dans ses foyers domestiques, dans son organisation et ses institutions populaires, dans ses libertés communales; pour en explorer le monde rural; savoir ce qu'y était le régime seigneurial, les rapports que nobles et

paysans y avaient entre eux, le point auquel ceux-ci étaient parvenus dans leur travail de libération foncière ».

C'est ce programme qu'a développé M. Ch. de Ribbe en le distribuant sous trois sections principales: la famille, la propriété, la commune. Il embrasse néanmoins tous les éléments constitutifs de la civilisation pour le lieu et le temps compris dans cette étude. Ce travail réunit à un même degré les qualités scientifiques du fond et les mérites littéraires de la forme. Il est un de ces travaux historiques essentiellement français, au meilleur sens du mot, où le savoir consciencieux de l'érudit est doublé de l'art du fin lettré et de l'homme de goût.

P. M.

PAOLO LUOTTO: Il vero Savonarola e il Savonarola di L. Pastor (Firenze, Le Monnier, 1897, x-620 p., gr. in-8°. 8 francs).

Cet important travail, qui semble avoir abrégé les jours de son jeune et savant auteur, professeur au Lycée royal de Faenza, est une réfutation des jugements émis par Louis Pastor dans son dernier volume de l'Histoire des Papes (t. III, 1895, Freiburg i. B., Herder). Il ne faudrait pas croire cependant que cette riche publication du professeur Luotto soit une œuvre de pure polémique. Tout en rectifiant les jugements de l'éminent professeur d'Innsbruck, elle est avant tout positive. Elle rassemble sur les points importants de la carrière et de l'activité de Savonarole les données les plus aptes à éclairer la question débattue. Comme de juste Luotto accumule avant tout les citations de Savonarole lui-même. On ne peut juger un homme, en effet, sans connaître sa pensée, sans entendre sa parole, puisque la parole de Savonarole est son action elle-même, l'instrument ordinaire par lequel il poursuit son entreprise et cherche à atteindre son but. En l'absence d'une édition des œuvres de Savonarole, dont quelques-unes sont devenues fort rares, la masse de citations de Luotto supplée à cette indigence et présente, groupés autour de nombreux sujets, les textes les plus importants et les plus caractéristiques pour connaître le célèbre réformateur florentin. L'ouvrage est donc précieux avant tout à titre de renseignements.

Dans quelle mesure le travail de M. Luotto réforme-t-il celui de M. Pastor? C'est ce qu'il serait intéressant de connaître, si cela ne devait nous entraîner au delà d'un simple compte rendu. Pastor, dans la justification qu'il a cherché de donner à sa manière de voir contre différentes critiques, pense qu'il n'est pas obligé de modifier ses jugements essentiels sur Savonarole. On pouvait s'attendre à ce résultat, l'auteur de l'Histoire des Papes étant juge et partie. Nous croyons cependant que quiconque aura lu ou plutôt étudié sans préoccupations d'apologie ou de dénigrement

les pages de Pastor et celles de Luotto demeurera convaincu que le véritable portrait du réformateur se rapproche bien plus de celui du professeur de Faenza que de celui du professeur d'Innsbruck. Et cependant, avec M. Pastor, nous avons à faire à un historien de profession, tandis qu'avec M. Luotto nous sommes en présence d'un historien improvisé. D'où vient cette différence? De la différence même des méthodes employées. Luotto, sans s'inquiéter outre mesure des jugements portés sur Savonarole, est allé l'étudier directement dans ses œuvres et les documents originaux. Son examen, ainsi qu'il nous l'a dit, est le travail d'une vingtaine d'années. Il l'avait entrepris avec de très graves préjugés contre Savonarole. Il a dû se rendre à l'évidence et n'a pas hésité à montrer le résultat de ses convictions ainsi que les autorités qui en étaient la justification.

Il en a été tout autrement avec M. Pastor. Celui-ci absorbé par la publication d'une histoire générale, un monument des plus remarquables au point de vue du travail qu'il a demandé à son auteur, ne pouvait entrer dans une étude de fond de la vie de Savonarole pour rédiger la cinquantaine de pages substantielles qu'il devait lui consacrer dans son histoire. Il a pris le seul parti pratique pour lui, ici comme ailleurs, de consulter les publications de documents et les études principales se rapportant à son sujet. Malheureusement les jugements les plus contradictoires et les plus extrêmes ont été portés sur Savonarole et, en présence de ce désarroi, M. Pastor semble s'être décidé à suivre et à contenter un peu tout le monde, en empruntant les jugements d'autrui avec un éclectisme très résolu. Toutefois, ce qui frappe chez Pastor, dans ce choix de jugements. étrangers, c'est comme le parti pris de n'entendre que les auteurs protestants et rationalistes, et en général les détracteurs caractérisés de Savonarole, pour s'abriter derrière eux, alors qu'il rejette les jugements favorables en les qualifiant sommairement d'apologies. Il arrive ainsi à donner à la plupart des actions de Savonarole un caractère ou au moins une nuance péjorative d'où résulte un ensemble manifestement noirci. Quelles raisons ont pu conduire M. Pastor à prendre cette attitude que rien d'objectif ne semblait commander? Je ne sais, mais je ne puis me dissuader, en voyant la persistance avec laquelle il aime à s'abriter derrière lat Civiltà Cattolica, que c'est dans cette revue qu'il a crutrouver son conseil de conscience scientifique. Je crois qu'en cela il s'est profondément mépris. La revue qui avait commencé par associer le nom de Savonarole à celui de Caserio et qui a fini par en faire celui d'un saint homme ne me paraît pas avoir des idées assez précises et assez sûres en la matière pour devenir le critérium ultime en lequel se résolvent finalement les convictions scientifiques d'un historien de Savonarole.

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Il est d'autant plus étonnant et plus regrettable que M. Pastor ait méconnu le caractère de Savonarole et de son œuvre que nul n'aurait dû mieux le comprendre que l'auteur d'une histoire ecclésiastique générale. Peu de personnages en effet tiennent plus étroitement à un milieu historique que Savonarole. Il est en fonction immédiate des grands courants moraux, intellectuels et religieux de son temps. C'est par eux qu'il se comprend et qu'il s'explique. Savonarole est un chrétien, un prêtre et un religieux qui, ayant un sens religieux profond, est indigné de la décadence. du christianisme de son temps. Dominé par sa foi et sa conscience, il entreprend une lutte qu'on peut, sans exagération, qualifier de gigantesque, pour le relèvement moral et spirituel de ce qui l'entoure. Ce qui étonne, c'est l'étendue même de son succès. Or ce que M. Pastor semble n'avoir pas vu, c'est la grandeur et le désintéressement de cette entreprise foncièrement chrétienne, en un temps où pas une voix puissante ne s'élève pour proclamer les droits de l'Évangile, où pas une tentative notable ne se fait jour pour corriger les mœurs et éveiller les consciences. M. Pastor n'ignore cependant pas l'état des choses à la fin du xve siècle. Il a dépeint, un peu froidement peut-être, mais avec sincérité, l'envahissement du paganisme humaniste, la décadence morale chez les simples chrétiens et chez les hommes d'église, il nous a dit du Pape qui occupe la chaire de saint Pierre, au moment où Savonarole cherche à réformer Florence, ces paroles significatives : « Le devoir d'un Pape en ce temps de décadence eût été de s'opposer au courant envahissant de la corruption; au lieu de cela, Alexandre VI, semblable aux autres princes séculiers, pensa que sa mission était de soigner les intérêts de sa dynastie, de sa famille. On n'est pas plus cruel en moins de mots. Mais alors, qui s'occupe des intérêts de l'église et des âmes? Sur quoi l'historien peut-il reposer son regard pour se donner la satisfaction de dire qu'il n'y avait pas que de la corruption. dans l'Église, et qu'après tout dire la conscience chrétienne a protesté par la bouche de quelqu'un, non pas dans l'obscurité vertueuse d'une vie ignorée, mais au grand jour, sur les toits, comme l'ordonne l'Évangile ? Je parcours le volume de 800 pages compactes de M. Pastor et je n'y trouve qu'un nom, celui de Savonarole. Et c'est en arrivant devant ce nom, alors que M. Pastor devrait se dire : enfin ! à la veille de la plus terrible révolution religieuse qui ait bouleversé l'Église, il ne sera pas dit qu'il n'y eut que des aveugles, des indifférents et des lâches, et que personne n'aura songé à signaler le péril et à le conjurer, c'est alors, dis-je, que M. Pastor croit satisfaire aux exigences de sa conscience d'historien et de catholique en recueillant chez les protestants et les rationalistes les extraits les plus malveillants sur Savonarole pour nous dire qu'il fut, en somme, un fanatique et un extravagant. L'auteur de l'Histoire des Papes pourra répondre

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