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REVUE THOMISTE

DE L'HABITATION DU SAINT-ESPRIT

DANS LES AMES JUSTES

D'APRÈS LA DOCTRINE DE SAINT THOMAS D'AQUIN

NEUVIÈME ARTICLE

EFFETS DE L'HABITATION DU SAINT-ESPRIT (Suite)

Les vertus infuses. Les dons du Saint-Esprit. — Les fruits et les beatitudes.

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I

Si la béatitude se donnait uniquement à titre d'héritage, nous n'aurions pas à nous préoccuper du soin de la mériter par nos œuvres; il suffirait pour l'obtenir de posséder, avec la grâce sanctifiante et par elle, le titre et la qualité de fils adoptif de Dieu. Tel est précisément le cas des enfants baptisés, tant qu'ils n'ont pas atteint l'âge de discrétion. Pour les adultes, il en va autrement; car, suivant la parole de saint Augustin, celui qui nous a créés sans nous n'a pas jugé bon de nous sauver sans nous. Il était, en effet, à tout le moins fort convenable qu'après avoir été déifié, et élevé par un don très sublime, jusqu'à la participation de l'être et

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de la vie de Dieu, l'homme fût mis en demeure d'agir divinement, d'exercer les fonctions de sa vie nouvelle et de devenir par là le coopérateur de Dieu et l'artisan secondaire de son propre salut. Aussi bien, le Concile de Trente, interprète infaillible de la vérité révélée, déclare-t-il ouvertement que « la vie éternelle doit être proposée aux justifiés, non seulement comme une grâce miséri<cordieusement promise aux enfants de Dieu par Notre-Seigneur, <«< mais encore comme la récompense de leurs bonnes œuvres et <«<le salaire de leurs mérites, comme une couronne de justice que «<le juste juge tient en réserve pour quiconque aura légitimement <«< combattu (1).

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C'est pourquoi l'apôtre saint Paul nous exhorte à abonder en toute sorte d'actions saintes, avec la ferme persuasion que, loin d'être stérile dans le Seigneur, notre labeur doit au contraire recevoir une magnifique récompense (2). Et pour stimuler notre zèle et secouer notre apathie, il nous rappelle que nous ne sommes sauvés qu'en espérance, spe salvi facti sumus (3), et que pouvant toujours hélas! perdre la grâce reçue, nous devons opérer notre salut avec crainte et tremblement (4). Unissant sa grande voix à celle de saint Paul, le chef du collège apostolique nous crie de son côté : < Efforcez-vous, mes frères, d'assurer par les bonnes œuvres votre << vocation et votre élection. En agissant de la sorte vous ne << pécherez pas, et vous vous ménagerez une heureuse entrée <«< dans le royaume éternel de Notre-Seigneur et Sauveur Jésus« Christ (5). »

Mais pour mériter, pour produire des actes en rapport avec

(1) « Proponenda est vita æterna, et tanquam gratia filiis Dei per Christum Jesum misericorditer promissa; et tanquam merces ex ipsius Dei promissione bonis ipsorum operibus et meritis fideliter reddenda. Hæc est enim illa corona justitiæ, quam post suum certamen et cursum repositam sibi esse aiebat apostolus, a justo judice sibi reddendam: non solum autem sibi, sed et omnibus qui diligunt adventum ejus.!» Conc. Trid., sess. VI, cap. xvI.

(2) « Abundantes in opere Domini semper, scientes quod labor vester non est inanis in Domino. » I Cor., xv, 58. -«Nolite amittere confidentiam vestram, quæ magnam habet remunerationem. » Hebr., x, 35.

(3) Rom., VIII, 24.

(4) « Cum metu et tremore vestram salutem operamini. » Philip., 11, 12.

(5) « Quapropter, fratres, magis satagite, ut per bona opera certam vestram vocationem et electionem faciatis ; hæc enim facientes, non peccabitis aliquando. Sic enim ministrabitur vobis introitus in æternum regnum Dei nostri et Salvatoris Jesu Christi. »> II Petr., 1, 10-11.

notre élévation surnaturelle, pour être en état de nous acheminer vers cette fin d'ordre supérieur, qui nous a été assignée par la divine miséricorde et que la nature est incapable d'atteindre par elle-même, pour agir divinement, en un mot, des forces, des puissances, des énergies divines, des secours spéciaux nous sont nécessaires. Dieu ne nous les a point refusés; il nous les accorde même avec une variété et une surabondance vraiment merveilleuses. De même, en effet, que dans l'ordre naturel nous possédons tout un ensemble de facultés, intellectuelles et sensibles, qui dérivent de l'essence de l'âme el constituent autant de principes prochains d'opération; ainsi, dans l'ordre surnaturel, nous recevons avec l'être spirituel toute une série de puissances nouvelles, qui découlent de la grâce comme ses propriétés, perfectionnent, ennoblissent, élèvent nos facultés au-dessus d'elles-mêmes et les rendent capables de poser des actes supérieurs aux forces de la nature (1). Sans doute, la grâce actuelle suffirait à la rigueur pour ces sortes d'opérations; et, de fait, c'est par des secours de ce genre, passagers et transitoires, que Dieu vient en aide au pécheur non régénéré, pour le mettre à même d'accomplir les actes préparatoires à la justification.

Mais quand la vie surnaturelle est parvenue dans une âme à l'état parfait, quand elle lui a été communiquée d'une façon stable par le don de la grâce sanctifiante, ce n'est plus seulement par des secours transitoires que Dieu pourvoit à ce que cette âme puisse exercer les fonctions de sa nouvelle vie; il lui infuse des principes d'activité proportionnés aux opérations qu'elle doit émettre, il lui donne des forces, des qualités surnaturelles permanentes, tranchons le mot, des habitudes, qui la mettent en état d'exercer d'une manière comme naturelle, connaturaliter, des œuvres surnaturelles. Ces habitudes sont les vertus infuses et les dons du Saint-Esprit.

Cet organisme surnaturel a été admirablement décrit, dans une page que nous nous reprocherions de ne pas mettre sous les yeux de nos lecteurs. « C'est quelque chose d'ineffable, dit Mgr Gay,

(1)« Sicut ab essentia animæ effluunt ejus potentiæ, quæ sunt ejus operum principia; ita etiam ab ipsa gratia effluunt virtutes in potentias animæ, per quas potentiæ moventur ad actus. » S. Tн., Summ. Theol., I IIae, q. cx, a. 4, ad 1.

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« que ce rayonnement actif et bienfaisant de Dieu dans la créa«<ture qu'il habite... Avant tout, Dieu rayonne et opère dans « l'essence de l'âme. Il y verse cette grâce radicale qu'on appelle << sanctifiante, et qui, étant à la fois la condition et l'effet premier « de sa présence surnaturelle, devient en nous un titre et comme « un passage à ses autres bienfaits, et livre l'âme tout entière à ases opérations, du moins en droit, en puissance et en principe. « C'est par cette grâce qu'il la délivre, qu'il l'innocente, qu'il la «fait neuve, jeune, candide, ouverte à toutes les influences auxquelles il la soumet, docile à toutes les impulsions qu'il lui « donne. C'est par cette grâce qu'il tient, pour ainsi dire, les « racines de cette àme, et, la greffant sur lui, fait qu'elle boit sa <«< sève trois fois sainte, et devient capable de la projeter dans « toutes ces magnifiques puissances par lesquelles elle s'étend « elle-même comme l'arbre par ses rameaux. Ces puissances natu<< relles, si nombreuses, si variées et déjà si admirables, sont divinement perfectionnées par cette diffusion intérieure, chacune « selon son ordre, sa fonction et sa fin. Toutes en reçoivent des qualités nouvelles, supérieures, essentiellement surnaturelles, qui sont tout à la fois des souplesses et des énergies, des doci«lités et des forces, des transparences et des foyers, rendant l'âme plus passive sous la main de Dieu et en même temps plus active « à le servir et à faire ses œuvres. Ce sont d'abord ces vertus sou<< veraines qu'on nomme théologales, la foi, l'espérance et la « charité. L'expérience nous fait voir que l'unique lumière du « soleil s'épanouit en plusieurs couleurs, et d'abord en trois prin

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cipales. Il semble que ces trois grandes vertus soient l'épanouis«sement immédiat de la gràce sanctifiante. Ce sont ensuite les « vertus infuses, soit intellectuelles, soit morales. Ce sont les << dons du Saint-Esprit qui, dérivant des trois vertus théologales « comme de leur source, mettent l'âme en état d'exercer divine«ment les vertus secondaires et deviennent les germes féconds ades fruits que Dieu veut récolter en nous. Sans doute le seul «sacrement de la confirmation donne d'office l'abondance de ces <«<dons sacrés; mais le simple état de grâce en implique la pré«sence dans l'âme, et il n'y a pas un seul juste qui ne les possède << tous dans telle ou telle mesure (1). » L'enfant lui-même, (1) Mgr GAY: De la vie et des vertus chrétiennes. Ier traité.

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