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de charmes. On dirait une ébauche tracée

par le génie de la peinture ou bien un premier jet de la pensée, avant que la palette ou le style les aient parés de leurs couleurs. A peu de distance est un petit corps de ferme : approchons. Quelques acres de terre médiocre y sont attachés. Il dépend des domaines du duc de Montrose, qui l'afferme plus cher que nous ne faisons nos meilleurs fonds. John Sinclair, le fermier, n'est pas revenu des champs. Sa femme porte sur ses bras, un enfant malade dont l'air languissant ne répond guère au nom pompeux de Mac-Farlane dont elle l'appelle. Ils ont douze vaches. Elle nous permet de voir son étable. Hélas! quel cloaque! quelle infection! Point d'autre litière que du fumier; point d'air; de mauvais fourrage; et la femme à peine vêtue, et son nourrisson plié dans des langes déchirés et dégoûtans de saleté. Certes dans notre France si reculée, dit-on, en fait d'économie rurale, on rencontre rarement un tel manque de soins et tant de misère.

La lune vient de se lever à l'extrémité opposée du lac. Sa pâle clarté effleure la surface immobile des eaux. Quel repos! Comme l'air est caressant! Quels aimables souvenirs s'emparent

de l'ame, la possèdent, l'enivrent en quelque sorte! Ai-je besoin de vous dire qui je voudrais avoir à mes côtés pour la remercier de se laisser aimer? Pendant notre absence une petite caravane est arrivée chez Stuart. Deux jeunes Anglaises en font partie. L'une d'elles a passé beaucoup de tems en France. Sa sœur est mariée à Vesoul. Elle nous parle de notre patrie avec amour, dans notre langue dont elle emploie les tours les plus élégans et les expressions les mieux choisies. Son accent étranger donne à ses discours une grâce particulière. Par-dessus tout elle est jolie, aisée dans ses manières, point sauvage, svelte et bien faite; et dans ses yeux on lit tout le bonheur de celui qu'elle préfère. Vous le voyez bien, sans que je le dise, qu'à cette heure avancée, après une promenade romanesque, sensible comme je le suis au ravissant spectacle d'une tiède nuit d'été, cette rencontre me cause quelque émotion, et jette quelque trouble dans mon cœur. Je ne m'en défends pas. L'aimable voyageuse nous reverra demain, ditelle, pour nous dire adieu : nous nous connaissons déjà, comme si nous étions compatriotes.

DÉPART POUR LE LAC KATRINE.

LE LAC KATRINE. — L'ILE D'HÉLÈNE DOUGLAS. LE RIVAGE BLANG.

RETOUR A CALLANDER.

LOCH-EARN-HEAD. LE VILLAGE DE SAINT-FILLANS.

LES ASSEMBLÉES DE FEMMES. LE PARC DE DUNIRA.COMRIE.

CRIEFF. PERTH.

Perth, le 17 juillet 1826.

Le jour paraît, et les travaux champêtres vont commencer. Dans la maison, chacun vaque aux soins du ménage. Assis gravement derrière une table près de la fenêtre du parloir, le bon Stuart reçoit les ouvriers de sa ferme, leur donne ses ordres, et distribue la besogne. La belle Emma et ses compagnons de voyage sont déjà prêts à partir pour le lac Lomond; et nous, heureux d'une nuit dont rien n'a troublé la tranquillité, reposés par un doux sommeil, nous attendons les matelots qui doivent nous conduire sur le lac Katrine. Ils arrivent. Ce sont des guides choisis et de vigoureux rameurs. L'un se nomme William Buchanan, l'autre Archibald Cameron. Leur chien aux longues soies tachées de feu, les

a suivis. Il nous faut gagner à pied l'extrémité orientale du lac. Nous côtoyons la petite rivière qui l'unit au lac Achray. Chemin faisant nous cueillons des fleurs sauvages, et nous cherchons à les nommer. Leur analyse nous occupe. Elles nous rappellent celles de nos campagnes, que nous irons revoir avec bonheur. D'abord profonde, la vallée s'élève peu à peu. Bientôt ce n'est plus qu'un ravin hérissé de roches éparses ou suspendues aux flancs de la montagne et menaçant le voyageur. N'est-ce point en ces lieux que commença la défaite du clan d'Alpine si vaillamment dispersé par les Saxons? Ce sentier qui borde un précipice, n'est-il pas le même où le chevalier de Snowdoun rencontra Blanche de Devan, l'infortunée qui vit mourir son fiancé le jour même de leur noce, et dont la raison s'égara, pour ne lui revenir que, lorsque blessée elle-même par la flèche d'un traître, elle était sur le point d'exhaler le dernier soupir? C'est encore ici que Cromwell, croyant étendre sa puissance, en trouva la limite, et renonça à soumettre les débris du loyalisme écossais. Grâces soient rendues au poète, à l'historien! Leurs chants, leurs récits peuplent ces solitudes de souvenirs héroïques et amoureux.

Mais nous touchons au port où nous devons nous embarquer. Encore un regard à nos bouquets de digitale pourprée, de paquerette sauvage, de renoncule à la corolle d'or, de morelle et de gantelée. Puis, adieu cette riante moisson! Il ne s'agit plus maintenant d'abréger la route, de courir de côté et d'autre pour cueillir quelque plante nouvelle. Le lac Katrine fait partie des domaines de lord Guydhyr, qui a construit sur le bord un hangar immense, pour enfermer un yacht et de petites embarcations à son usage. Nos marins en ont la clef. Ils y prennent leurs avirons. Un canot propre, léger, bien coupé, est amarré au rivage : c'est le leur. Ils le détachent. Nous nous y plaçons avec précaution, car il est d'une telle mobilité sur sa quille, qu'il semble toujours près de chavirer. Habitué à cette excursion, le chien s'est couché sur l'avant. Nous partons. Les deux rives se touchent presque. Quoique le vent soit violent, nous n'éprouvons encore aucune oscillation. A peine avons-nous doublé le cap qui ferme la baie, que la vague nous assaille aussitôt. Là se déploie un spectacle magnifique. En face, on découvre la plus grande partie du lac, ses criques, ses îles, les flancs arides ou boisés des monts dont le pied trempe

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