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compte de ces exilés, le calcul exact du capital qu'ils recevront en terres, en outils, en graines, et auquel ils devront plus tard la vie, le couvert, un pécule, voire même une grande fortune, appât aussi trompeur qu'il est éloigné. Tous finissent par conseiller l'expatriation, à leurs concitoyens pauvres. C'est ainsi que l'année dernière a vu le nombre de ces émigrans s'élever à dix mille quatre cent vingt-deux; et que déjà cette année, il en est parti près de neuf mille'. Envers les riches on tient un autre langage. Aussitôt que le continent leur fut ouvert, ils l'inondèrent. Reproches d'incivisme et de désertion, menaces de surimposer leurs biens, lenteurs dans la délivrance des passeports, rien ne fut épargné pour les retenir, et ne réussit à les dissuader de l'ardeur voyageuse qui les possédait. Ceux-ci croyaient échapper à l'ennui: ceux-là fuient la misère. Quelle est donc cette Angleterre, si orgueilleuse de son opulence, de

Émigrans d'Angleterre, de 1825 au 1er janvier 1830 :

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sa liberté, de sa puissance, de ses lois et de sa civilisation? N'y a-t-il point d'alliage dans son or, et de pierres fausses dans son diadème? C'est ici qu'on peut voir les pieds d'argile du colosse. Le principe de la vie dégénère, quand la circulation se borne aux régions du cœur, et n'arrive pas aux extrémités.

Allons prendre possession du gîte qui nous est destiné. Debout sur le seuil de leurs portes, nos hôtes nous attendent. En nous voyant, ils s'empressent d'offrir leurs services. Ce sont leurs chambres et leurs lits qu'ils nous cèdent, et qui seraient passables, surtout pour une nuit, si partout nous n'étions poursuivis par une insupportable odeur de tourbe. L'air en est infecté. Nos vêtemens l'ont déjà contractée. Elle saisit l'odorat et pénètre à travers les pores. Le linge, les mets en sont saturés. Ce dégoût empoisonne jusqu'à notre sommeil.

DÉPART POUR STAFFA. — LES ROCHES ROUGES.

ARDNAMURCHAN.

L'ILE DE COLL. LES ILES LUNGA, GOMETRA, ULVA.— STAFFA.

LA GROTTE DE STAFFA. LE PLATEAU DE STAFFA.

SOUVENIRS DE MA JEUNESSE.—IONA. — SOUVENIRS HISTORIQUES. ASFECT D'IONA.-LE PORT.-LE VILLAGE.-L'INTÉRIEUR D'UNE MAISON. LE CIMETIÈRE. LES RUINES DE LA CATHÉDRALE.

LE DROIT DE PROPRIÉTÉ.

RETOUR AU PAQUEBOT. — ENCORE STAFFA. — LES HÉBRIDES.
SUPERSTITIONS.-LES PICS DES ILES DE RUM ET DE JURA.

CHANTS ET DANSES.

LE MAL DE MER. UN CACHALOT. TOBERMOREY.

Tobermorey, le 26 juillet 1826.

Au lever de l'aurore, les sons de la musette retentissent sur le rivage. Ils annoncent l'heure du départ. Aussitôt chacun se rend à bord, et les curieux se rassemblent sur le quai. Des environs il est arrivé de nouveaux passagers. Entre ceux de la veille, la connaissance était déjà faite. Nous nous accueillons tous amicalement. Les plus heureux et les moins susceptibles se louent des logemens qui leur étaient échus : les autres déplorent leur mauvaise fortune. Mais la

journée qui se prépare, ne tarde pas à effacer l'impression produite par les malencontres de la nuit. Staffa et Iona, ce qu'on en sait et ce qu'on en attend, occupent tous les esprits, absorbent toutes les facultés, animent tous les entretiens; et l'imagination prête à ce voyage toutes les illusions de ses enchantemens. Bien qu'un brouillard froid et humide obscurcisse les premières clartés du soleil, les matelots, familiers avec la connaissance du tems, nous promettent une belle traversée. Impatiens, nous hâtons de nos vœux le moment de quitter le port. Enfin la dernière manoeuvre vient de se faire; et quelques tours de nos rames circulaires suffisent pour nous mettre hors de la baie. En face sont les Roches Rouges, Red Rocks, et la rive montueuse d'Ardnamurchan. Sous la forme d'épais nuages, la brume, chassée par le vent, roule d'abord à la surface des eaux. Puis se rarefiant

peu à peu, elle s'élève dans l'atmosphère. Réduite enfin en flocons légers, elle se dissipe entièrement. En même tems le ciel s'éclaire par degrés; bientôt des torrens de lumière s'y répandent, et son dôme d'azur se déploie dans toute sa magnificence. La mer est à peine ridée. Aucun bruit ne se fait entendre que celui

de notre marche rapide; et la teinte verte des eaux n'est interrompue que par les deux lignes d'écume que trace notre sillage, dont l'angle s'agrandit dans le lointain, et qui finissent par disparaître. Depuis quelques instans nous ne voyons plus ni les côtes de Mull, ni celles du comté d'Argyle. D'autres moins étendues se dessinent à l'ouest. Elles appartiennent à l'île de Coll dont les habitans sont renommés pour l'amour qu'ils portent à leur ingrate patrie. Malgré la stérilité du peu de terre qui couvre ses rochers, la rigueur de ses saisons, l'horreur des tempêtes qui l'environnent, ils y sont attachés par un charme invincible. On n'en voit point rechercher l'occasion de l'abandonner. La vie triste et laborieuse qu'elle leur impose, suffit à leur courage et comble leurs désirs.

Désormais nous allons au midi. Après avoir laissé à l'est le cap de Runa-Trillick, nous passons entre l'île Lunga, la plus grande de l'archipel des Treshannish, et celles de Gométra et d'Ulva, situées à l'entrée du lac Nakeal. Des écueils, des récifs pointent de toutes parts. Sans danger aujourd'hui, on conçoit qu'un gros tems en rende le voisinage périlleux, d'autant que la moindre lame les dérobe complétement à

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